Repéré en décembre 2022 chez Bianca, j’ai emprunté début janvier 2023 à la médiathèque Ce genre de petites choses de Claire Keegan (éd. 2020, 117 pages), un court roman qui a été chroniqué entretemps aussi chez Fondant. En décembre 1985, à l’approche de la quarantaine, Bill Furlong, marchand de bois et de charbon a réussi sa vie tant personnelle (marié et père de cinq filles) et professionnelle (gérant une entreprise prospère), alors même qu’il est né sans père et d’une mère domestique enceinte à 15 ans qui a pu l’élever auprès d’elle grâce à la générosité et la bienveillance de sa patronne, la riche veuve Mrs Wilson. Le travail ne manque pas à l’approche de Noël.
Une livraison de charbon au couvent de son village va bouleverser sa vie si bien rangée et l’amener à se questionner sur sa propre existence. En effet, dans la réserve de charbon, il découvre une jeune fille esseulée, pieds nus malgré le froid de l’hiver qui semble avoir passé la nuit là et inquiète du sort réservé à son bébé de 14 mois sur le point d’être vendu par les Sœurs du couvent. Ce n’est pas la première fois qu’il est témoin d’incidents dérangeants au couvent. De nombreuses rumeurs circulent d’ailleurs mais personne jusqu’alors ne s’y appesantit d’autant que le couvent est généreux et permet de faire tourner l’économie locale. Face à l’hypocrisie générale et à la très grande influence des religieuses catholiques, que pourrait bien faire Bill Furlong: : fermer les yeux, mettre un terme aux agissements du couvent ou à tout le moins aider cette pauvre jeune fille?
J’ai apprécié le personnage de Bill Furlong, un homme ordinaire, tranquille mais déterminé à ne plus resté indifférent aux agissements constatés au couvent qui le renvoient à sa propre trajectoire de vie, à celle de sa mère qui aurait pu finir dans ce couvent sans Mrs Wilson et à sa quête des origines paternelles. Son bonheur se heurte à la maltraitance du couvent.
L’histoire s’inspire des Magdalene laundry en Irlande, les derniers couvents ayant été fermés en 1996 et qui exploitaient pour des travaux de blanchisseries des femmes et jeunes filles dans des conditions quasi carcérales afin de les « laver de leurs pêchés », la plupart du temps placées par leur propre famille car enceintes hors mariage, considérées comme trop effrontées et impertinentes, voire même trop coquettes et « aguicheuses »…
Un roman certes court mais marquant, tout en pudeur et au style concis, à la fin ouverte qui laisse une petite part à l’espoir, dans l’esprit d’un conte de Noël, même si je serai plus pessimiste, les répercussions s’annonçant terribles pour Bill Furlong!
J’ai enfin noté quelques passages gourmands pour le challenge Des livres (et des écrans en cuisine) comme la préparation du gâteau de Noël par la famille de Bill (p.25/26) qui donne envie de lécher la cuillère avec le reste de pâte, les repas de Mrs Kehoe dans son pub (p.96) ou bien encore l’assiette d’œuf ou bien encore le cake aux fruits et le thé servi chez les religieuses (p.72).
Oui, un roman marquant, je te rejoins ! 🙂